Résumé : Bordeaux le 6 mai 1803 Madame Salles à Marseille Jugeant ma chère fille des sentiments de mes enfants par celui que je ressens pour chacun d’eux, je ne mets aucun doute que tu n’aies partagé la douleur profonde et les vifs regrets que j’éprouve de la perte de mon pauvre Marius. Le pauvre enfant me témoignait 15 jours avant de se séparer de moi pour toujours, toute la satisfaction qu’il aurait, avec sa femme, de me presser contre son cœur et tout le plaisir qu’il éprouverait d’aller à Marseille, de te serrer dans ses bras en te présentant sa compagne et d’embrasser Madame Roux et sa bonne Figuière. Le pauvre enfant comptait toucher bientôt au bonheur de se revoir parmi ses meilleurs amis. Le ciel nous a privés de cette douce satisfaction et, en nous séparant pour toujours, il met le comble à un malheur et à une infortune. Mon pauvre Marius ! Mes regrets et mes larmes m’accompagnent jusqu’au tombeau. Quelque plaisir que j’aurais eu, ma bonne amie, de t’embrasser ; tu aurais commis une imprudence en te rendant auprès de moi dans l’état où tu te trouves dont j’aurai eu mauvais gré. Tu as donc infiniment mieux fait de différer cette satisfaction. J’espère que je pourrai me la procurer au mois de septembre prochain et te serrer dans mes bras aussi tendrement que je t’aime. |
Vous seuls, mes chers enfants, m’attachaient aujourd’hui à une vie qui en deviendrait importune et à charge, si je n’étais bien assuré que vous m’aimez autant que je vous chéris. Lise, son mari et son fils sont auprès de moi bien portants. Je leurs sais bien bon gré des sentiments qu’ils m’ont témoignés dans l’affreuse circonstance où je me trouve. Jamais mes larmes ne tariront de la perte cruelle d’un aussi bon fils ! Il ne m’avait jamais donné le plus petit chagrin. Mon cher Marius ! Tu as toujours été mon meilleur ami. Ton oncle, tes tantes, Caroline, toute la famille t’embrasse. Moi je le fais du milieu de mon cœur. Ch. Salles Embrasses Benjamin et ta chère petite Constance Adresse : |