6 Août 1800 - Lettre de Charles Salles à son neveu Benjamin Salles

    

Résumé :
écrite à Hambourg de Charles Salles à son neveu et gendre Benjamin Salles.
Un oncle de Benjamin (Jean-Baptiste Salles) est mort aux Antilles et lègue sa fortune à sa fille Lise (exécuteur testamentaire M. Sauvignon) sauf 40 000 livres tournois à chacune des 2 filles d'Aglaé dont la rente leur sera payée jusqu'à ce qu'elles se marient ou à leur majorité.
Cet oncle aurait souhaité que sa fille épouse Marius, fils de Charles Salles; si ce mariage n'avait pas lieu, Marius recevrait en dédommagement 100 000 livres tournois.
M. Sauvignon qui aurait écrit tout ceci à Charles ajoute qu'un acheteur s'est présenté pour acheter leurs 3 maisons en haut de la rue Beauséjour et en a offert 120 mille livres tournois. Comme nous n'avons plus de soutien à St Pierre, nous autres héritiers avons intérêt à vendre tout ce que nous avons là bas.
Dépêchez vous, hâtez-vous de me rejoindre pour examiner ensemble ce que nous devons faire.
Entre-temps j'écris à M. Despesaille (son beau-frère, mari d'Élisabeth) de m'envoyer sa procuration et ses ordres de vente.
Lise est logée chez M. Sauvignon avec ses cousines; elle ne s'opposera pas je pense à son mariage avec Marius.

Noms propres :
Sauvignon -Despesaille


à  Mr Benjamin Salles à Marseille
Hambourg le 6 Août 1800

Je vous confirme mon cher Benjamin le contenu de ma lettre du 4 courant depuis laquelle j’ai reçu, comme je vous l’avais annoncé dans mon post-scriptum, des lettres de Mr Sauvignon des 12 et 29 Mai, qui me confirme la perte que nous avons faite et qui me donne avis d’une partie des dispositions que votre oncle a fait dans son testament dont il est nommé son exécuteur testamentaire et tuteur de sa fille qu’il a instituée sa légataire universelle. Il a fait un legs à chacune des deux filles d’Aglaé de 40 mille livres dont la rente leur sera payée jusqu’à ce qu’elles soient pourvues de mariage ou à leur majorité, réversible de l’une à l’autre en cas de mort.

Sauvignon me dit que votre oncle a emporté de bien grands regrets de n’avoir pu être le témoin du mariage se sa fille avec Marius, évènement qui faisait, dit Sauvignon, depuis longtemps, l’objet de ses plus chers désirs, il en a été occupé jusqu’à son dernier moment puisqu’il l’a expressément prié de conduire cette affaire à son heureuse fin, et de me faire connaître tout le regret qu’il éprouvait de ne pouvoir m’embrasser avant la fin de sa carrière.

Il a ajouté dans le testament que dans le cas que le mariage projeté n’aurait pas lieu en raison de ce que les parties ne se conviendraient pas, il accorde cent mille livres tournois à mon fils de dédommagement, il lui recommande sa fille ainsi qu’à moi de la manière la plus particulière.

 

Voilà mon cher Benjamin tout ce que Mr Sauvignon m’a appris relativement à cet objet. Il m’ajoute en outre que peu de jours avant le décès de votre oncle, un acheteur s’était présenté pour acheter nos trois maisons du Haut de la rue Beau Séjour au prix de 120 mille livres.

Sauvignon paraît très fâché qu’il n’ait pu terminer cette affaire, parce que, dit-il, toutes nos maisons sont dans le plus pitoyable état au point même que quelques unes seraient inhabitables. Si les logements n’étaient pas aussi rares, cet avis joint à l’évènement cruel qui nous prive de notre soutien à Saint Pierre me fait penser que sans hésiter nous devons nous réunir pour vendre tous les capitaux que nous pouvons avoir à Saint Pierre, où il ne nous convient plus d’avoir aucun intérêt, c’est je crois bien celui de chacun de nous en particulier.

Quand vous serez auprès de moi, nous concerterons ce qui sera le plus utile à faire, mais hâtez vous de devoir (vous) mettre en route, il est très important que vous pressiez votre voyage pour vous rendre dans notre ville le plus promptement qu’il vous sera possible afin que vous puissiez profiter de l’ami qui doit partir dans les derniers jours d’octobre, pour votre paye et qui se chargera avec plaisir de tous les papiers, lettres et documents que vous pourrez lui donner.

En attendant je vais inviter Mr Despesaille de m’envoyer sa procuration et des ordres pour concourir avec nous à la vente de nos capitaux et du partage qui doit en être les suites.

Lise est logée chez Mr Sauvignon à l’Habitation où elle est avec ses cousines, bien portante. J’ai lieu d’espérer qu’elle ne changera pas de résolution et qu’en condescendant aux désirs et aux vœux que son père lui a manifesté dans ses derniers moments, elle ne portera aucun obstacle au mariage projeté. Je le souhaite dans le grand intérêt de mon fils dont cet établissement doit faire le bonheur.

Embrassez bien tendrement, pour Marius et moi, ma chère Manette et ses chers enfants, nous vous disons l’un et l’autre un million de choses les plus affectueuses. Nous vous attendons avec la plus grande impatience à ne pas différer à vous mettre en route parce qu’il est pressant que vous arriviez

Tout amour mon cher Benjamin.

Charles Salles


Adresse :
Mr Benjamin Salles
Rue du Baignoir
A Marseille
cachet : HAMBURG