29 Février 1862 - Lettre d'Edouard à son père, Albert Fine (1807-1887) 

29 février 1862 - Lettre d'Edouard à son père Albert Fine pour lui confirmer sa vocation et lui demander la permission de rentrer dans la Compagnie de Jésus.

Dimanche 29 Février 1862

Mon bien cher papa,

Dans votre dernière lettre vous me parlez d'une chose dont vous m'avez déjà entretenu pendant les vacances, je veux parler du choix d'un état de vie . Depuis longtemps il est déjà fait : le bon Dieu m'appelle dans la Compagnie de Jésus, et d'une manière si forte que je ne puis douter de ma vocation. Le père à qui j'ai communiqué mes intentions pour m'aider de ses conseils, m'a dit que, non seulement il croyait que c'était ma vocation, mais qu'il en était certain. Dimanche dernier, je suis allé trouver le père Recteur : je lui ai ouvert mon cœur, il m'a dit que cela ne l'étonnait pas du tout.
Du reste personne ne m'a jamais poussé ni même ... dans le choix que j'ai fait. Ce n'est que quand j'ai été bien sur de mon affaire que j'en ai parlé. Il y a déjà deux mois que je suis certain que c'est ma vocation. Et il était temps de vous en instruire.

Ne vous affligez pas de cette nouvelle : c'est ce qui vaut le mieux pour moi, puisque le bon Dieu m'appelle là. Quand on songe à la brièveté de cette vie et à la nécessité de son salut, on fait bien vite ce sacrifice. Je sais bien qu'il y a toujours un sentiment naturel, mais si je vous quitte, c'est pour aller à Dieu. Dans une famille si nombreuse, il faut bien que le bon Dieu ait sa part.

Je vous prie de tenir ma résolution secrète et surtout de ne pas en parler à Albert ni à Henri parce qu'ils ont la langue longue. Pour mes sœurs vous pouvez bien le leur dire.

Dans vos lettres, quand vous me parlerez de cette affaire, ne les adressez pas à Alfred car je ne voudrais pas qu'il le sut. Qu'une moitié de la lettre soit pour lui et l'autre pour moi afin que je puisse la partager au milieu, car il se fâcherait si je ne lui faisais lire les lettres. Il est déjà de mauvaise humeur de ce que je ne lui fasse pas voir la lettre que je vous écris.

Adieu, mon cher papa, je vous embrasse de tout mon cœur.
votre fils béni
Edouard

Envoyez moi s'il vous plait quelques timbres poste